Pourquoi je n’impose plus le véganisme à mes enfants.

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Oui enfin bon d’accord, je ne l’impose plus tout à fait à mon fils de 7 ans. Ma fille, qui vient d’avoir 3 ans, n’a pas encore son mot à dire… mais ca viendra. Il y a de cela maintenant un bon paquet de mois (je dirais bien deux ans), je publiais sur mon ancien blog « Oui, j’impose le véganisme à mes enfants ».  Le blog a été hacké mais j’en avais une copie que j’ai republié ici, et que je vous invite à lire si mes motivations vous intéressent. (A noter qu’aujourd’hui, si j’impose et continue d’imposer le véganisme à ma plus petite, certaines motivations peuvent être différentes mais ça, ça sera peut être le sujet d’un autre article).

A l’époque, l’article a cartonné, il était partout, il y a eu des centaines de commentaires et critiques sur tous les réseaux sociaux, les pages, les groupes. Il y avait les gens d’accord avec moi, ceux qui ne l’étaient pas, ceux qui comprenaient mais n’appliquaient pas la même politique (comme l’explique par exemple l’auteur Martin Page dans cette interview pour IAmVeganTV), ceux qui s’insurgeaient avant même de lire s’imaginant que je nourrissais mes enfants au lait de coco et qu’ils allaient mourir dans la semaine. J’ai eu du soutien, des compliments, des insultes, on m’a posé beaucoup de questions notamment : « oui mais quand ils grandiront et voudront prendre leurs propres décisions, que fera-tu ? Et s’ils ne restent pas véganes, comment réagira-tu? » Je vais tenter de répondre à ces deux questions aujourd’hui.

D’abord, je tiens à vous rassurer. Mon grand garçon m’a fait peur à un moment mais aujourd’hui, devant chaque nouvel aliment il me demande si c’est végane. Au supermarché s’il voit quelque chose qui lui plait et que ca n’est pas végane, attristé il le reposera mais il l’oubliera aussitôt, d’autant que j’ai vite fait d’aller au rayon d’à côté pour lui trouver l’équivalent sans souffrance pour remettre le soleil sur son petit visage d’ange. Mais pourquoi cet article en fait ? Parce que comme dit quelques lignes plus tôt, à un moment j’ai eu peur, j’ai été confrontée à des désirs de mon fils qui, pour la première fois, argumentait au lieu d’obéir. J’étais déstabilisée mais ce fut une expérience finalement positive et enrichissante, que je tenais à partager avec vous afin de vous aider. Et aussi parce que j’aimerais bien refaire plus de 100k de vues, c’était cool d’être célèbre et de mettre le bazar dans toute la véganie (je déconne) (non) (à vous de juger).

 

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L’anniversaire.

Mon fils est invité à l’anniversaire d’un copain et s’inquiète de savoir s’il y aura quelque chose qu’il peut manger. La maman dudit copain, connaissant le régime végétalien de mon fils et soucieuse aussi de la santé d’un autre invité allergique au gluten, me demande si je veux bien avoir la gentillesse de préparer quelque chose de végétalien et sans gluten pour l’occasion. Mon fils part donc à l’anniversaire de son copain avec ses muffins aux pépites de chocolat préférés (recette de AuVertAvecLili). Il m’a demandé avant la fête s’il pouvait manger autre chose, si c’était grave de manger une saucisse ou une salade avec du jambon ou du gâteau « pas végane ». J’étais perturbée car c’était la première fois qu’il me posait une question aussi franchement sur le sujet. Je lui ai rappelé que la viande et le lait venaient d’animaux, que moi je n’en mangerais pas car les animaux ne sont pas d’accord, mais que lui, à 6 ans, il pouvait décider et que je respecterai sa décision. Je ne savais pas si c’était trop tôt pour lui permettre de prendre cette décision mais j’avais assez confiance en lui et dans les valeurs que je lui transmettais pour être sûre a 100 % qu’il n’y toucherait pas. Après tout, s’il posait la question, c’était qu’il réfléchissait. S’il réfléchissait, pourquoi ne pas le laisser décider seul après avoir répondu à ses questions ? Et pour cette fois, j’ai vu juste : il n’y a pas touché (oui parce qu’en Allemagne, les parents restent à l’anniversaire la plupart du temps, en tout cas en Bavière). Si vous avez survécu à la fête d’anniversaire, passons à la suite, et là s’il vous plaît, mettez vos ceintures parce que ça va vous secouer.

Le zoo.

Mon fils, ma fille et moi avions l’habitude d’aller au zoo, le Tierpark de Munich. J’avoue que pendant longtemps je me suis faite avoir par le côté parc, les grands espaces, les donations à des fondations, etc. Et puis le zoo était chouette : des aires de jeux super, des glaciers, un enclos de chèvres avec accès libre pour les caresser et les nourrir. J’adorais la proximité avec les animaux qu’offrait ce Tierpark, et on y passait de bons après midi à se promener et s’amuser. Puis j’ai su la vérité et je n’ai pas renouvelé ma carte d’abonnement. Ca n’a pas plu à mon fils, mais on a trouvé de nouveaux endroits supers chouettes et on a vite oublié. Jusqu’au moment fatidique. L’année dernière, dernière année de maternelle. En allant chercher mon fils, l’éducatrice me demande de signer l’autorisation de sortie le zoo. Je lui réponds qu’avant de signer, j’en discuterais avec mon fils, persuadée qu’il ne voudrait pas y aller. Une fois rentrés, j’attends un moment calme pour entamer la discussion. Je lui ai rappelé pourquoi nous n’allions plus au zoo et je lui ai demandé s’il avait vraiment envie d’y aller. Je lui ai dit qu’il devait y réfléchir lui même et que je me tenais à sa disposition pour répondre à ses questions et que je respecterais son choix. Et finalement, il m’a dit vouloir y aller : tous ses copains y seraient. On se moquerait de lui s’il ne venait pas. Il avait envie de s’amuser avec les autres à l’aire de jeu parce que l’aire de jeu avec les copains du quartier ce n’est pas pareil qu’avec les copains de l’école. Il voulait revoir le grand pont suspendu et manger une glace. Il voulait caresser les chèvres. Maman, laisse moi y aller.

J’avais dit que je me tiendrais à sa décision. Mais qu’est ce que j’ai raté ? Pourquoi veut-il aller dans cette prison pour animaux malgré mes supers arguments en béton armé ? Est-ce que je lui ai mal expliqué ? J’étais triste et en colère, contre moi pas contre lui, mais j’ai signé l’autorisation de sortie et mon fils est allé au zoo avec ses copains. Est-ce que c’était trop tôt ? Aurais-je choisi de le laisser choisir s’il avait fallu que je paye l’entrée de ma poche ? Je me suis posé beaucoup de questions.

Quand mon fil est rentré, il était content, il avait passé une bonne journée avec ses copains et ses institutrices. Il m’a expliqué que les éléphants se balançaient de gauche a droite pour faire rire les gens. Je n’ai pas eu le coeur de lui dire la vérité ce jour là.

Quelle leçon j’ai tiré ? Que mon fils commençait à suivre son propre chemin (j’ai les larmes aux yeux là, ça pique) et qu’il ne suivait pas forcement le même que moi. Est-ce que c’est grave ? Non, au contraire, c’est même une bonne chose qu’il ai assez confiance en moi pour me dire qu’il a envie d’aller à un endroit où je n’ai pas envie d’aller. Il n’a jamais redemandé à y retourner. Et quand on passe devant l’aquarium de la ville, il dit « oh les pauvres poissons ».

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Le MacDo

Toujours là ? Ok. On passe au Mac Do. Et là, si vous n’êtes pas du genre très tolérant/ouvert/compréhensif, allez lire autre chose (par exemple le dernier livre tout frais tout végane qui vient de sortir : La Révolution Antispéciste, dont le super blog HowIMetYourTofu nous offre une critique assez sympa) ou respirez un grand coup ou prenez un sédatif ou un calmant pour le coeur s’il vous plaît. Parce que mon fils a mangé des nuggets, oui du MacDo, que je lui ai payé avec mon argent, alors que j’étais déjà végane.

Pour ma part, si je fais mes courses entre le magasin végane, le magasin bio, le Monop’ et Lidl, normalement je boycotte totalement une entreprise comme le Mac Do. J’estime que les 2 fois dans l’année où j’y mets les pieds par faiblesse n’ont aucun impact, il m’arrive donc d’y aller me jeter sur un Veggie, en Allemagne. Sans le fromage, en Allemagne, le Veggie c’est végane (je préfère préciser, je donne deja assez d’éléments à certains pour me lyncher, n’est ce pas 😉

Un soir, on rentre du centre ville mon fils, ma fille et moi. Tout le monde est crevé, je mangerais bien un veggie avant de rentrer. Je demande à mon grand s’il se sent capable de manger un si grand hamburger et ses yeux s’illuminent a l’idée d’avoir un HappyMeal. Sauf que… problème Nº1 : pas de sandwich vegan dans le HappyMeal (impossible à négocier), problème Nº2 j’ai déjà commandé mon menu, problème Nº3 mon fils meurt de faim et ses yeux qui brillaient de mille étoiles brillent maintenant de mille larmes, problème Nº4 il trouve mon sandwich trop grand et veut des nuggets. Je lui rappelle ce que c’est des nuggets, crûment je lui dis que c’est des restes de poulet mort et qu’on a aussi tué des poussins. Il s’en fiche, il veut des nuggets. Je lui propose de prendre un HappyMeal, de jeter les nuggets, et de manger avec moi un Veggie et les frites, le dessert, et il aurait son jouet. Il veut toujours ses nuggets, et ma fille commence à s’impatienter dans sa poussette. Et puis je me dit qu’après tout il sait, que ça le regarde, qu’il va sur ses 7 ans, qu’il doit faire ses propres expériences : je cède. Je cède même deux fois en un mois parce que je voulais retenter l’expérience qui, vous l’avez deviné, n’a pas marché la première fois. Sadisme ou foi ?
Finalement, je me demande si ca n’est pas trop tôt et on n’est plus retourné au Mac Do. Quand j’en parle avec mon fils un peu plus tard, il me dit que c’est trop bon les nuggets, que le Veggie de toute façon est trop gros (je fais un bide quand je lui demande comment ça se fait que sa petite soeur en mange des petits morceaux coupés par mes soins). Je me suis dit que c’etait peut-être une question de gout : peut être que mes gâteaux véganes maison sont meilleurs que les gâteaux non véganes, c’est donc plus facile pour lui de s’en passer que les Nuggets, qui étaient meilleurs au MacDo qu’à la maison. Finalement j’ai refais des nuggets à la maison. Une nouvelle recette : nuggets plus petits, plus compacts (c’est a dire moins mous), avec potatoes et Ketchup à volonté. Et sans citron surtout parce que c’est ça qu’il n’aimait pas trop, m’a t’il dit ce jour là… Bingo.

Et puis un jour, son père m’envoie une photo, ils sont au Mac Do et tout le monde déguste… un Veggie !

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Alors ? Trop jeune pour prendre les bonnes décisions ? Pour comprendre qu’on ne va pas au zoo même pour s’amuser avec ses copains, qu’on ne mange pas un nuggets parce que c’est plus simple que le grand hamburger ? Et pourtant, à l’anniversaire, il a prit la décision inverse qu’au Mac Do. Pourquoi ? A quel âge peut on prendre les bonnes décisions ? Et puis c’est quoi une bonne décision ? Est-ce que c’est d’être végane et c’est tout, ou de faire comme maman et c’est tout ? Est-ce une bonne ou une mauvaise chose de faire son bonhomme de chemin d’enfant en faisant quelques entraves au véganisme et aux valeurs que nos parents tentent de partager avec nous ? Je n’ai pas les réponses à ces questions.

Ce que je sais, c’est que mes enfants sont libres de faire leurs propres expériences. On en parle calmement. Pour moi il est plus important qu’ils sachent que je les écoute, soutiens et respecte les personnes qu’ils sont/les choix qu’ils font plutôt qu’ils soient véganes pour me faire plaisir. C’est important pour moi qu’ils comprennent ce qu’est vraiment le véganisme, qu’ils le ressentent, qu’ils aient envie vraiment de vivre avec ces valeurs là, parce que s’ils n’y croient pas, ils laisseront tomber. On ne mène pas une vie si elle n’a pas de sens profond pour nous. Je ne suis pas prête à prendre le risque qu’ils deviennent carnistes parce que je les ai forcé ou que j’ai refusé une fois des nuggets au Mac Do, une sortie au zoo, parce que je n’ai pas respecté leur nature curieuse d’enfant, les oppositions normales et que je leur ai refusé leurs propres expériences. Je crois sincèrement qu’il faut que, si je leur enseigne les bases, le reste doit venir d’eux même, comme ça m’est venu. Le véganisme ne s’est pas imposé à moi : ça a été une évidence. Et ça doit en être une pour mes enfants.

Est-ce que je serais triste si l’un ou l’autre ne devient pas un végane en herbe plus tard ? Oui. Je rêve de les voir à mes côtés dans les manifs, peut être que l’un des deux tiendrait le magazine plus tard. Je serais triste, et déçue de moi, je me dirais que j’ai peut être raté quelque chose mais je saurais que mes enfants vivent libres, selon leurs valeurs, et pas enfermés dans les miennes. Que mes enfants vivent dans une prison, je le refuse aujourd’hui, et, j’espère, le refuserais toujours.

Des Kiss et du Love,
Noita

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6 commentaires sur « Pourquoi je n’impose plus le véganisme à mes enfants. »

  1. Je n’ai pas d’enfants donc l’expérience n’est pas là mais je sais que quand j’aurais des enfants, je leur laisserai le choix. Comme tu dit, le véganisme a été une évidence pour toi donc se sera aussi pour tes enfants (et les autres).

    Tu es une super vegan maman rien que pour l’écoute et les discussions que vous avez ensemble. 😀

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  2. Je trouve que ta façon de faire est très saine. Il faut se dire que nos enfants sont des apprentis véganes, comme nous l’avons été nous aussi à un moment. On se questionne, on se cherche et on se demande où sont les limites (rien qu’à voir les questions sur les forums véganes : de « dois-je nourrir mon chat avec des aliments véganes » à « que faire si on m’offre un pull en laine ? »).
    Et puis faut pas oublier non plus qu’on vit dans une société où le spécisme est à chaque coin de rue. Ça en fait des tentations ! Donc je trouve ça bien que tu laisses la possibilité à ton fils de faire ses propres choix même si c’est dur pour toi. Et au final, on voit bien que ça paye 😊

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  3. C’est un très bel article ❤ (je pourrais commenter plein d'autres trucs, mais c'est l'essentiel qui me vient à l'esprit ! Et ça me rappelle ce que soulignaient les théoriciens anarchistes, en disant que la pédagogie libertaire ne visait pas à fabriquer de petits anarchistes, mais justement à former des personnes qui soit capable de remettre en cause ce qu'on leur apprend…)

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